Chênaies artificialisées en feuillus/conifères

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Description

Les chênaies artificialisées en feuillus ou en résineux sont des plantations d’essences feuillues (essences ligneuses* caducifoliées*) et résineuses (conifères, à feuillage persistant*) issues d’arbres élevés en pépinière. Elles sont le plus souvent destinées à la production de bois ou installées à des fins de compensation, suite à des défrichements*.

En jeunesse, ces plantations sont facilement reconnaissables à leur physionomie ordonnée (arbres plantés en rangs) et homogène. Cette régularité a tendance à disparaître avec le temps, sous l’effet des différents traitements sylvicoles.

Les plantations d’arbres réalisées sur le canton ont différentes origines :

  • les plantations destinées à la production, qui sont situées pour la plupart au sein des grands massifs forestiers (bois de Versoix, de Jussy et de Chancy) sur des stations* qui seraient naturellement occupées par les chênaies ou les hêtraies.
  • les plantations hors forêt réalisées à des fins de compensation suite à des défrichements autorisés (plantations de compensation), qui sont considérées comme de nouvelles surfaces forestières. Elles ont, la plupart du temps, été réalisées lors de grands projets de construction, comme lors du chantier de l’autoroute de contournement lancé au début des années 1990, mais également lors de la création de l’autoroute Genève-Lausanne au début des années 1960.
  • les plantations de reboisement, qui ont eu lieu pour la plupart à partir des années 1950. Exceptionnelles, elles sont réalisées pour la remise en état de grandes surfaces défrichées il y a de nombreuses années, notamment des anciennes décharges ou des gravières.

La carte cantonale des milieux distingue à l’échelle du 1 : 5’000e les milieux suivants :

  • les chênaies artificialisées en résineux sont dominées par l’épicéa (Picea abies)1, parfois par le sapin blanc (Abies alba)1 ou le mélèze (Larix decidua)1, tous trois des essences indigènes* qui ne sont pas (ou peu) présentes naturellement en plaine. Le sapin de Douglas (Pseudotsuga menziesii), originaire de l’ouest de l’Amérique du Nord, a aussi souvent été planté pour sa croissance rapide et son bois de qualité1. Les plantations de résineux sont souvent très régulières, avec des arbres de même taille, très rapprochés. Dans ces formations généralement monospécifiques*, les strates* arbustives et herbacées sont quasiment inexistantes du fait du manque de lumière au sol et de l’acidification du sol par les aiguilles des conifères. Nombre de ces plantations ont été réalisées sur des surfaces où le taillis* du chêne était dégradé. Actuellement, la politique de gestion des forêts a abandonné la pratique de plantations de résineux et favorise les forêts naturelles. Ces plantations, héritées du XXe siècle, se rencontrent encore dans les grands massifs forestiers du canton.
  • les chênaies artificialisées en autres feuillus sont essentiellement composées d’érables (Acer pseudoplatanus et A. platanoides)1, de peupliers (Populus nigra et P. alba)1 ou de robiniers (Robinia pseudoacacia)1. Dans ces forêts, le caractère caduc* des feuilles permet aux rayons du soleil d’atteindre le sol durant une bonne partie de l’année, ce qui permet l’expression d’une belle strate* herbacée1. Les surfaces qui ont été plantées avec des chênes (Quercus petraea et Q. robur) et du charme (Carpinus betulus) sont aujourd’hui rattachées aux chênaies à charmes grâce à une gestion des forêts favorisant les chênaies et le régime de la futaie irrégulière*, 2.

Profil

Surface en hectares
243
Pourcentage du canton occupé
0.86%
Humidité
-
Acidité
-
Richesse en nutriments
-
Granulométrie
-
Naturalité
Value
2

Le saviez-vous?

Avant que l’usage du plastique ne se généralise, le peuplier (Populus spp.) était apprécié pour ses nombreux débouchés commerciaux. Le bois de cette essence à croissance rapide était utilisé pour la fabrication de nombreux objets quotidiens : boîtes, panneaux, etc. De plus, comme cette espèce nécessite beaucoup d’eau pour sa croissance, cela permettait également de drainer les sols et elle a longtemps été utilisée pour assécher les zones marécageuses.

Valeur biologique

La valeur biologique des surfaces plantées dépend des essences installées. A Genève, les plantations sont souvent composées d’espèces* indigènes* et présentent à ce titre un intérêt comparable, ou presque, aux formations naturelles, lorsqu’elles ne sont pas monospécifiques*. Toutefois, elles présentent souvent moins de structures que dans les forêts naturelles. Par contre, le choix de cultivars* non indigènes* est moins adapté à la faune* locale, ils auront par conséquent un intérêt biologique plus faible. Notons que les résineux sont des essences peu représentées naturellement sur le territoire genevois. A ce titre, leur présence au sein des massifs forestiers, principalement dans les plantations, permet l’apparition d’espèces* qui se feraient normalement plus rares*. C’est, par exemple, le cas du roitelet huppé (Regulus regulus) ou de la mésange huppée (Lophophanes cristatus) qui sont liés aux résineux.

Le saviez-vous?

Le sapin de Douglas (Pseudotsuga menziesii) est une essence originaire d’Amérique du Nord et de l’Est asiatique qui a été plantée en Europe pour sa croissance rapide et son bois très solide3. Ses aiguilles dégagent une odeur de citronnelle lorsqu’elles sont froissées3.

Vulnérabilité et gestion

Historique

A la fin de la Seconde Guerre mondiale, après des siècles d’exploitation intensive, les chênaies genevoises sont en mauvais état, si bien que le Conseil d’Etat demande à l’inspecteur cantonal des forêts de l’époque d’élaborer un plan général pour l’amélioration des forêts du canton. Adopté en 1949 par le Conseil d’Etat, ce plan, préconisant notamment l’abandon du régime du taillis*, sera ensuite renforcé dans sa mise en œuvre par le vote d’une nouvelle loi cantonale sur les forêts en 1954. Celle-ci engage alors fortement l’Etat dans une politique de restauration forestière qui vise à obtenir, à terme, des futaies* de meilleure qualité, plus saines et plus productives3. Cette phase de transition s’appuya sur la technique la plus largement utilisée de la transformation par vieillissement (également appelée conversion) et, dans une moindre mesure, sur la technique de la transformation par plantations (également appelée substitution)1, 3.

Dans le cadre de la transformation par plantations, des peuplements entiers étaient récoltés pour faire place à de nouvelles plantations1, lorsque les rejets de souche n’étaient plus suffisamment vigoureux et étaient de qualité sylvicole trop médiocre. Les essences de feuillus nouvellement plantées se révélèrent bien souvent insuffisamment concurrentielles face aux rejets des anciennes souches encore en place. Pour les maintenir, il fallait engager d’énormes moyens1, ce qui rendait la démarche onéreuse et longue, pour un résultat incertain.

C’est ainsi que l’on opta majoritairement pour les résineux qui supportaient plutôt bien la concurrence et l’ombrage des rejets de souche des chênes en jeunesse et finissaient par prendre le dessus à plus long terme.

Les rejets de souche qui se maintenaient conservaient quant à eux toute leur utilité puisqu’ils constituaient par la suite un peuplement accessoire favorable à «l’éducation des tiges» et à l’amélioration des sols. La faible luminosité du sous-bois permettait finalement d’étouffer les anciennes souches et de récolter de belles tiges d’essences résineuses dont le bois se vendait à des prix plus intéressants. Il suffisait, après la récolte, de replanter des essences de feuillus ou de travailler avec des semis* naturels issus d’arbres semenciers présents dans les alentours pour obtenir, à terme, des futaies* de franc pied*.

Au début des années 2000, le projet chêne 2000 permit de rajeunir complètement une centaine d’hectares d’anciens taillis* selon le principe de la futaie régulière*, via la plantation de jeunes plants de chênes de provenances locale ou régionale. Les plantations étaient effectuées durant les premières années, puis les forestiers ont quasi systématiquement laissé le rajeunissement naturel s’installer.

Ce projet prit fin au début des années 2010, avec le passage au régime sylvicole de la futaie irrégulière*, qui consiste à travailler essentiellement avec une sylviculture fine, arbre par arbre, ainsi qu’avec du rajeunissement naturel diffus, réalisé dans des petites bulles de rajeunissement. Ce régime sylvicole vise à maintenir durablement sur une parcelle (unité de gestion) des arbres de toutes les dimensions et avec une grande diversité d’essences4.

Gestion actuelle

Actuellement, dans le cadre de la gestion des forêts selon les principes de la futaie irrégulière*, le Service du paysage et des forêts ne recourt plus que dans de rares cas à ce genre de plantations. Dans les forêts de l’Etat, les anciennes plantations sont peu à peu conduites vers des peuplements d’essences en station* grâce à une sylviculture proche de la nature visant à favoriser les chênaies.

Cartographie

Les plantations de compensation ne sont pas cartographiées de manière spécifique. Bien que de composition variable, ces plantations sont rarement dominées par des résineux et elles ont été rattachées aux chênaies artificialisées en autres feuillus dans la carte des milieux naturels du canton.

 

Les chênaies artificialisées en feuillus ou en résineux ont été créées par l’homme et leur dynamique est tributaire de la gestion qui en est faite. Si les plantations ne sont pas maintenues après chaque rotation, les essences d’arbres alentour naturellement présentes vont peu à peu s’installer. Cette évolution sera moins rapide dans des plantations de résineux où le manque de lumière, l’épaisse couche de litière et l’acidité des sols rendront l’installation et la croissance des semis des feuillus indigènes* plus difficiles.

Espèces

Flore vasculaire
Oiseaux
Mésange huppée Lophophanes cristatus
Mésange noire Periparus ater
Roitelet huppé Regulus regulus
Lépidoptères
Processionnaire du pin Thaumetopoea pityocampa
Coléoptères terrestres
Callidie violacée Callidium violaceum
Capricorne des maisons Hylotrupes bajulus